Friday, November 19, 2010

LA CHARTE DE KURUKAN FUGA ET LA DÉCLARATION UNIVERSELLE DES DROITS DE L'HOMME

L’éminent historien Guinéen, Djibril Tamsir Niane [1] qui a édité la Charte de Kurukan Fuga[2] explique qu’au lendemain de sa victoire de Kirina qui lui a donné le dessus sur Soumaoro Kanté, Soundiata, le fondateur de l’Empire du Mali, avait convoqué au 13e siècle, plus précisément en 1236, une assemblée qui avait pris un ensemble de « décisions » et de « recommandations » qui sont devenues la loi fondamentale de l’Empire. C’est cet ensemble de décisions et de recommandations aux allures d’une déclaration des droits humains qui constitue la cette charte de Kurukan Fuga.

Elle a effectivement l’allure d’une déclaration des droits humains. En fait, si la terminologie n’est pas la même, l’idéal et la logique interne est la même.

La Charte de Kurukan Fuga avait été élaborée après une guerre ; de même la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme (DUDH) a été écrite après la deuxième guerre mondiale pour mettre en jeu des principes qui garantiraient la paix et permettrait de dire : « Plus jamais çà. »

La Charte de Kurukan Fuga compte 44 articles. L’offense la plus grave pour cette charte c’est « enlever la vie » d’un innocent, c’est-à-dire le meurtre. L’article 5 de la Charte stipule en effet : « Chacun a le droit à la vie et à la préservation de son intégrité physique. En conséquence, toute tentative d’enlever la vie à son prochain est punie de la peine de mort »[3].Si cet article constitue le fondement de la Charte, alors d’une certaine manière, la DUDH et la Charte de Kurukan Fuga partagent le même fondement : la protection de la vie.

La possibilité d’un fondement similaire entre la DUDH et la Charte de Kurukan Fuga, suggère que si l’expression « Droits Humains » serait importée en Afrique et aurait des velléités d’impérialisme politique et culturel, son idéal ne le serait pas puisqu’un texte africain bien antérieur aux révolutions américaine et française comprend le même idéal.

La Charte de Kurukan Fuga peut donc servir d’argument politique dans le débat sur la généalogie du concept des droits humains.

[1]Il est l’auteur de Soundiata ou l’épopée mandingue.

[2]CELHTO, La charte de Kurukan Fuga. Aux sources d’une pensée politique en Afrique, Paris, L’Harmattan, 2008. Le CELHTO est le Centre d’Etudes Linguistiques et Historiques par la Tradition Orale basé à Niamey au Niger.

[3]Ibid., p. 45.


1 comment:

Amoctad said...

Article, je le lire profondément car j'ai un exposé qui porte sur une étude comparative entre LA CHARTE DE KURUKAN FUGA ET LA DÉCLARATION UNIVERSELLE DES DROITS DE L'HOMME. Merci